150805
Aujourd’hui, il a appris que quand on est noir, on n’a pas le droit de courir la nuit.
Il sortait du ciné avec son pote, et ils parlaient de leurs projets d’avenir. Il avait le moral blindé, il était super motivé pour écrire et dessiner, prêt à prendre son avenir en main. Ils étaient devant chez son ami, et ils s’étaient quittés sur un « salut, passe demain chez moi ».
Heureux, il commence à courir en direction de chez lui, prêt à mettre en pratique tout ce dont lui et son ami avaient parlé.
Il traverse la rue, toujours en courant, et il s’apprête à entamer une deuxième rue quand une vieille voiture blanche lui coupe dans sa course. Il pensait que c’était un conducteur qui voulait quelques renseignements, alors il ne s’inquiète pas et garde le sourire. Puis il entend :
« Pourquoi tu cours ? »
À ce moment-là, deux flics descendent de la voiture.
Il leur répond :
« Bin, je rentre chez moi, pourquoi je n’aurais pas le droit de courir ? »
Apparemment non. Un noir qui court la nuit est suspect, forcément il a commis un crime. Et là, en plein milieu de la rue, ils commencent à le fouiller, bloquant tous les autres conducteurs qui le regardent comme s’il était un criminel. Mais dommage pour eux, il n’a rien sur lui qui puisse lui valoir une inculpation.
Son seul crime ce soir-là a été d’être noir.
Si c’est vraiment un crime, alors il plaide coupable. Il le dit aujourd’hui : il est fier de ses origines.
Mais pour eux, tous les noirs sont les mêmes la nuit et sont suspects. Aujourd’hui, il a fait les frais de leur paranoïa. Lui qui les a souvent défendus auprès des autres, maintenant il comprend pourquoi certains en ont après eux.
Au moment où il écrit cela, il a les larmes aux yeux. En même temps, il est énervé et dégoûté. Il a été traité comme un criminel alors qu’il sait qu’en vérité, il sera toujours innocent de ce genre d’accusations. Il a envie de pleurer, en pensant que ses larmes vont changer quelque chose, mais il en doute fort.
C’est la deuxième fois que des flics le fouillent, soit parce qu’il marchait tranquillement en compagnie d’autres noirs, soit parce qu’il courait. Il voit que maintenant, un noir n’a pas le droit d’être en compagnie d’autres noirs, ni courir quand le soleil est couché. Bordel de merde, voilà que même à pied, la vitesse est limitée pour les noirs.
On n’a pas le droit de marcher ni de courir… Que faire ? Ramper ? Ramper à leurs pieds ? Jamais de la vie. Même devant les dieux, il ne ramperait pas. Alors eux… pffff, plutôt crever.
Il écrit ce texte en écoutant de la musique déprimante et en se soulant au Coca-Cola Aldi, et sa rage augmente de seconde en seconde, de minute en minute. Il a une envie d’exploser, de les exploser.
Et le pire, c’est qu’à la fin de la fouille, ils osent dire « Bonne soirée »… Pff.
« Je t’en mettrait des « bonne soirée » moi, espèces de… » pensait-il